Gridania : Anamnèse

E-Sumi-Yan et Kyuuji avaient discuté pendant presque deux heures et n’avaient fait qu’aborder le sujet en surface. Mais il faisait nuit depuis longtemps. Le Raen retrouva Venceslas à l’entrée de la guilde des élémentalistes. Le Hyurois l’attendait appuyé contre l’arbre. En le voyant arriver, il se redressa et le salua d’un geste de la main en souriant.

— Bonsoir Kyu. Bien remis ?

— Vence, bonsoir. Ça va mieux, merci. Je suis désolé, tu as dû m’attendre longtemps.

Venceslas sourit malicieusement.

— Non, je savais que tu ne partirais pas avant la nuit.

— Tu le savais ?

Venceslas se contenta de sourire. Soudain, Kyuuji comprit tout. La scène à laquelle il avait assistée au quartier général de l’Ordre des Deux Vipères lui avait paru étrange. Il ne s’agissait que d’une mise en scène pour l’amener à se souvenir de l’incident. Les mots que Venceslas lui avait soufflés alors qu’il n’avait même pas repris ses esprits devaient le pousser au souvenir suivant. Le Hyurois avait tout comprit. Il avait tout orchestré. Kyuuji dut lui reconnaître que c’était bien joué.

— Savais-tu que ça allait me faire perdre connaissance ainsi ?

Venceslas fit une grimace.

— Non, je me doutais bien que ça te mettrait dans un sal état mais pas à ce point. Désolé.

— Comment savais-tu que je recouvrerais toute la mémoire ?

— Je ne le savais et je ne m’y attendais pas. (Le Hyurois désigna la guilde des élémentalistes.) Quand tu as perdu connaissance, je t’ai amené ici. Le Padjal voulait t’examiner lui-même. Il disait pouvoir profiter de ton état pour te guérir complètement, s’il s’y prenait bien. (Il haussa les épaules.) Un tour de main et il disait t’avoir soigné. Je ne voyais aucun changement mais il avait l’air très sûr de lui. Je l’ai cru. Je me doutais que tu voudrais discuter avec lui dès ton réveil alors je ne t’ai pas attendu.

Kyuuji pouffa. L’esprit de Venceslas se montrait parfois d’un tel détachement, c’en devenait risible.

— Je vois. Je suppose que je dois te remercier, mon frère. (Kyuuji s’inclina exagérément.) Merci, Venceslas.

Le Hyurois croisa les bras sur sa poitrine prenant un air faussement supérieur.

— Oui, oui. Redresse-toi maintenant.

Kyuuji s’exécuta et continua son jeu. Il se posa une main sur la poitrine d’un air bien trop révérencieux.

— Ta générosité est sans limite.

Venceslas éclata de rire. Un rire franc, honnête et joyeux. Un rire contagieux. Les deux amis rirent de bon cœur et durent faire de grands efforts pour reprendre leur souffle.

— Tu m’as manqué, Kyu.

— Je suis désolé pour tout ça.

Le Hyurois écarta sa remarque d’un geste.

— Alors, maintenant que tu as toute ta tête…

— Toute ma tête ?

— … raconte-moi ce qui s’est passé depuis la dernière fois.

Kyuuji savait très bien à quoi il faisait référence. Ils étaient partis faire une mission dans la forêt du sud pour le compte des Deux Vipères. Ils avaient dû se séparer pour la mener à bien. Le Hyurois s’était infiltré dans un camp de brigands, se faisant passé pour l’un d’eux, tandis que Kyuuji surveillait les allés et venus depuis un poste en hauteur, gardait contact avec l’officier en charge de la mission et prenait leurs nouveaux ordres. Il assurait la coordination et surveillait le déroulement de l’opération, en somme. Cela dura plusieurs lunes. Les deux amis ne pouvaient échanger leurs informations qu’en de rares occasions, et très brièvement. Ils avaient cependant réussi à trouver ce qu’ils cherchaient et attendait l’opportunité de mettre en œuvre leur plan. Seulement, ils n’avaient pu arriver jusque là.

— Un matin, en quittant mon campement pour rejoindre mon poste d’observation, j’ai ressenti la présence d’un esprit. Un esprit très insistant. Quand j’ai voulu prendre contact avec lui, j’ai été submergé par une quantité incroyable d’éther. Ça a dû avoir un effet sur moi. E-Sumi-Yan disait avoir vu des perturbations dans mon éther. Et en reprenant mes esprits, j’avais tout oublié.

C’était aussi simple que cela. Toute cette histoire pour de l’éther qui lui était monté à la tête. Littéralement et allégoriquement. Pourtant, ni Kyuuji ni Venceslas n’en rirent. Les esprits avaient une grande importance pour eux. L’intervention de l’un d’eux pouvait avoir une signification particulière. Mais ils n’en sauraient sûrement jamais rien. Retrouver cet esprit semblait impossible, à moins qu’il ne se manifeste de lui-même.

La meilleure chose à faire était de tourner la page et de continuer à avancer. Ils n’avaient pas réellement d’objectif à long terme, en dehors de se faire une place et de continuer à vivre, mais ils avaient bien l’intention d’y arriver.

Elfe des bois

Le
Val-boisé, une forêt dense aux arbres hauts, la terre des Elfes des
bois, était la province boisée du sud-ouest de Tamriel. Cette contrée
était composée du Bois de Graht, Prasin, Malabator et d’une partie de la
Marche de la Camarde. C’était dans ces forêts immenses que les villages
et villes des Elfes de bois, ou Bosmers, avaient poussé. Les Bosmers ne
construisaient pas de maisons, ils les faisaient pousser grâce à des
graines, des rituels ou directement avec l’aide de la forêt. Les grands
arbres accueillaient les maisons des elfes, leurs branches formaient des
allées entres les logements ou les différents étages. Parmi les arbres
les plus étranges et les plus incroyables que tout Tamriel compte, les
Chênes-Graht étaient les plus remarquables, ils étaient en effet
capables de se déplacer. La capitale du Domaine d’Aldméri, Faneracine,
en possédait un en une époque maintenant révolue.

Les
Elfes des bois ont toujours entretenu un lien bien particulier avec les
forêts du Val-boisé, le Pacte Vert, une part de leur nature. Toute leur
culture, leur société, leur façon de voire le monde, tout était
étroitement lié au Pacte Vert. Les récits racontaient qu’au temps du
Chaos, toute vie pouvait changer de forme, passant de plante à animal et
à Mer. Il se disait qu’Y’ffre, Dieux de la forêt et de la chanson, se
changea lui-même en prenant la forme du premier Ehlnofey. Ainsi
s’établit la loi de la Nature, mettant un terme au Chaos. Y’ffre créa en
premier le Vert, toute forme végétale, vint ensuite son peuple favori,
les Bosmers, enfin fut créé le Pacte Vert, liant les Bosmers au Vert,
pour leur survie mutuelle. Le Pacte Vert n’influait pas seulement les
résidences bosmériques, il influençait également l’art, la culture,
toutes les créations du peuple de la Sève. Les règles qui régissaient le
Pacte Vert, si elles pouvaient être violées, l’étaient au prix d’un
courroux impitoyable du Vert, dictaient aux Bosmer de ne nuire en aucun
cas au Vert, de ne manger quoique ce soit issu d’une vie végétale, de ne
manger que de la viande, de ne pas laisser pourrir les adversaires
vaincus mais d’en manger leur chaire, de ne prendre aucune vie
inutilement et enfin de ne pas se transformer, se sont des Elfes des
bois, leur forme étant sacrée. Sous cette influence, cueillir une fleur
de sa tige, prendre une pomme à sa branche ou encore abattre un arbre
était considéré comme un péché capital. Cependant, si une menace magique
venait à compromettre le Vert tout devait être mis en œuvre pour la
faire disparaître, même s’il s’agissait d’en abattre la souche. Le
Mandat de la Viande était une partie du Pacte Vert, incarné par les
règles sur les obligations et restriction alimentaires, stipulant que
l’ennemi défait au combat devait être consommé dans les trois jours. Le
Mer victorieux pouvait partager ce repas avec les membres de sa famille.
Ainsi certains, ceux qui suivaient encore cette disposition archaïque,
suivaient un jeûne avant de grandes batailles, s’affamant pour se
nourrir de leurs adversaires. Les récits racontaient qu’à une époque
lointaine où le Mandat de la Viande était particulièrement suivit, la
force et la bravoure d’un guerrier se mesuraient à la longueur des bois
qui leurs poussent sur la tête, signe du cannibalisme accentué des
Bosmers.

Les
Elfes des bois étaient encore souvent considérés comme des sauvages,
des primitifs, voire des barbares, en raison de leur style de vie, mais
en ignorance de cause. Le Pacte Vert assurait encore à cette époque la
survie des Bosmers et du Val-boisé. Certes, il limitait leur ascension
sociale et économique, mais leur offrait une alternative de progression.
Les Bosmers ne se préoccupaient généralement pas de l’argent, de leur
image, du pouvoir ou des biens matériels. Ils avaient la réputation
d’être espiègles et enjoués, ils se jouaient souvent des tours entre eux
ou mêlant les étrangers. Les Elfes des bois étaient également très
connus pour leur habilité à l’arc. Leurs arcs et flèches n’étaient pas
faits de bois mais d’os, ligaments, cornes et tendons, dans le respect
du Pacte Vert. Ils se racontaient que les os utilisés pour leurs flèches
ou leurs arcs chantaient des histoires, des histoires de morts. En
cela, la provenance de l’os portait une grande importance, plus la bête
était dangereuse, plus l’arme serait meurtrière. Ainsi était la culture
des Bosmers.

En
2E 564, une peste se répandait toujours sur les régions méridionales,
dont le Val-boisé, épargnant seulement les villages les plus reculés.
C’était encore le cas du village XXX où Faejine Odria vit le jour cette
année-là. Les coutumes les plus ancestrales et les plus archaïques y
étaient encore pratiquées. La voie de l’archerie était également vue
comme honorable et beaucoup s’y engageaient corps et âmes. C’était
notamment le cas du père de Faejine, Gaenry Odria, un des rôdeurs de
Voileronce. Les rôdeurs de Voileronce incarnaient les soldats d’élite et
relevaient directement des ordres du Roi Camoran. Certains rôdeurs
étaient qualifiés pour l’espionnage et l’assassinat, ce n’était pas le
cas de Gaenry, trop doué à l’arc et en stratégie pour mettre de tels
talents de côté. Les rôdeurs de Voileronce avaient reçu la permission du
Roi de rompre le Pacte Vert afin de mieux le protéger. Les croyances et
les convictions de chacun dictaient leur choix de rompre, tout, en
partie, ou pas le Pacte. Les rôdeurs étaient tenus en haute estime par
le Roi, mais tous les Bosmers ne les voyaient pas d’un bon oeil, surtout
ceux ayant choisi de rompre le Pacte Vert. La position de Gaenry en
tant que combattant et de conseillé stratégique lui permettait de
respecter le Pacte Vert.

La
mère de Faejine, Finwee Odria, était une Bosmer aimante et
attentionnée. Les Elfes des bois avaient une longévité supérieure à
celles des humains mais les femmes Bosmers ne pouvaient avoir que très
peu d’enfants. Finwee chérissait donc son premier enfant comme son
dernier. Bien que Gaenry ne fut que peu présent, l’environnement
familiale de Faejine était chaleureux, aimant et agréable.

Auridia

En
2E 567, cela faisait quelques années que le Roi Camoran était en guerre
avec les Orques des bois. Gaenry se montrait entreprenant, il
organisait les défenses du Roi, combattait aux côtés de ses hommes et
tenait en échec les Orques. Il se faisait largement remarqué par le Roi
mais aussi par les instances militaires des Haut-elfes. La formation du
Domaine d’Aldméri rapprocha les peuples du Val-boisé, en guise de bonne
volonté de la part du Roi Camoran, celui-ci détacha une unité des ses
rôdeurs à Auridia. Il mit Gaenry à la tête de cette unité, pour ses
prouesses aux combats et stratégiques, mais lui assigna un suppléant
pour lui enseigner les rouages de la politique, la finesse de la
politesse et de la bienséance. Les origines de Gaenry et son choix de ne
pas rompre le Pacte Vert ne lui facilitèrent pas la tâche. Son
caractère non plus. Gaenry, archer émérite et intelligent, était d’une
arrogance sans borne. Ce trait de caractère n’était pas courant chez les
Elfes des Bois, et jurait d’autant plus lorsqu’il rejoignit les
Altmers.

Gaenry
partit donc pour Auridia, accompagné d’un petit détachement de rôdeurs
sous ses ordres. Sa femme et sa fille le suivirent, pour l’accompagner
et le soutenir dans ce changement. Sur la route, leur cœur se serra en
quittant le Val-boisé, ni Gaenry ni Finwee n’avaient encore quitté la
protection du Vert. Ils embarquèrent sur le bateau les menant à Auridia
avec une appréhension naturelle, quitter à la fois leur terre, leur
culture et leur famille fut difficile. Mais nécessaire pour le bien du
Domaine en construction, et ils le savaient. Les routes n’étaient pas
toutes sûres, de nombreuses tensions locales ou la présence de bandits
rendaient le trajet éprouvant pour les civiles, mais les rôdeurs de
Voileronce se débarrassaient efficacement des menaces sur leur trajet.
Les Haut-elfes présents, dont la mission était de les conduire jusqu’à
Auridia, admirèrent leurs talents mais se montraient également fort
utiles pour défendre le convoie. Finalement, les rôdeurs de Voileronce
et leur famille arrivèrent à Auridia. Cette île, au climat et à la
végétation bien différents de ceux du Val-boisé, semblait tellement
isolée du Vert, le cœur de Finwee se serra d’avantage, elle tint bon en
tirant sa force de la présence de sa fille. Faejine, maintenant âgée de
trois ans, était espiègle, vive et joyeuse à souhaits. Elle faisait la
fierté de sa mère. Gaenry, lui, se raccrochait plutôt aux rôdeurs placés
sous sa responsabilité, il maintenait l’ordre et la cohésion du groupe,
planifiant leurs déplacements et ceux du convoi, organisant les rondes
et les rations. Finalement, il prit goût au commandement. Son arrogance
lui valant quelques remontrances des Haut-elfes mais celles-ci
alimentaient sa fierté et il ne manquait pas de jouer avec eux. Gaenry
n’était pas mal vu des Haut-elfes, l’arrogance était leur domaine, ils
étaient même étrangement proches de lui, et malgré les tours qu’ils se
jouaient, se faisaient confiance mutuellement.

Le
convoi arriva enfin à Prime-tenure, la plus grande ville Altmer de tout
l’actuel Domaine d’Aldméri. Les rôdeurs furent reçus en grandes pompes
par le roi Hidellith et son héritière, Ayreen. Les récits des Altmers
ayant accompagnés le convoi furent grande impression et le roi félicita
personnellement Gaenry qu’il demanda à ses côtés. Le Bosmer arrogant
accepta, bien sûre, l’invitation. Depuis lors, Gaenry passa le plus
clair de son temps avec les politiques et militaires Altmers. Ses
rôdeurs n’en restèrent pas pour compte, il s’arrangeait pour leur
trouver toute sorte d’occupation, mais il délaissa sa famille. Son
arrogance et sa fierté, déjà grandes pour un elfe des bois, grandirent
avec sa renommée. Alors, lorsque son unité de rôdeurs fut placée sous le
commandement du prince Naemon, à la suite de la disparition de
l’héritière Ayreen, Gaenry n’attendit plus de sa fille, bientôt en âge
de suivre l’éducation normale, qu’elle suive le même chemin que lui,
qu’elle contribue à sa propre gloire.  Ne refusant rien à son
marie, qu’elle chérissait encore malgré son absence, Finwee inscrivit
donc Faejine dans une école altmer de Prime-tenure. Faejine, espiègle et
maligne, se fit des amis facilement et elle prit goût à l’école. Sa
mère l’éduqua également aux coutumes de son peuple, lui apprit son
histoire et ses croyances. Le Pacte Vert prit une dimension importante,
loin de ses terres natales, l’enfant s’y accrocha comme pour se rappeler
ses racines. Gaenry, ravi de savoir que sa fille suivait les pratiques
du Pacte Vert, vit là une occasion de montrer un peu plus son influence,
il confia son apprentissage de la chasse à l’un de ses rôdeurs, mais ne
prit pas plus de temps pour leur rendre visite.

A
l’âge de six ans, en 2E 570, Faejine intégra une école militaire où
elle apprit les rudiments du combat et de la magie ainsi que de la
stratégie. Consciente de la renommée de son père et souhaitant, comme
tout enfant de son âge, que ses parents fussent fières d’elle, Faejine
s’investit énormément dans ses études ainsi que dans la chasse avec les
rôdeurs, dans le respect du Pacte Vert et les pratiques ancestrales.
Déjà de petits bosses révélant de futures cornes pointaient sur son
front,  faisant la fierté de toute sa famille. Au court de sa
formation, ses professeurs altmers décelèrent également chez elle une
affinité pour la magie, rien d’anormal pour une Bosmer, encore moins
parmi les Altmers. De part ses efforts, ses aptitudes magiques et le
statut de son père, beaucoup dirent d’elle promise à un grand avenir.

Rupture

La
formation militaire de Faejine se poursuivait bien. Elle apprit le
maniement de plusieurs armes, mais sa préférée restait le bâton,
amplifiant sa magie et débridant sa créativité. Les rôdeurs chargés de
lui apprendre l’art de la chasse avaient abandonnés l’idée de la voir
aussi douée que son père à l’arc, mais la traque l’amusait encore.
Faejine avait maintenant huit ans, cela faisait maintenant cinq ans
qu’elle n’avait pas vu son père. Gaenry était toujours occupé entre son
poste auprès du prince Naemon, son rôle auprès des rôdeurs de Voilronce
détachés à Prime-tenure et l’entretient de son image. Celle-ci avait
pris une proportion telle qu’il la cultivait plus que tout le reste. Son
comportement devenait incompréhensible pour sa femme et ses proches
Bosmers, par contre, elle collait tout à fait à ce qu’attendaient les
Altmers qui le côtoyaient. Finwee, bien habituée à la vie à Auridia,
inculquait toujours les pratiques de son peuple à sa fille, qui les
suivait à la lettre. Malgré l’absence de son mari, elle ne dit jamais de
mal de Gaenry en la présence de sa fille ou de qui que se soit,
cherchant plutôt à maintenir un lien entre eux. Cependant, quelques mois
avant la fin du premier cycle de l’école militaire, en 2E 573, à l’âge
de neuf ans, Faejine rencontra son père pour la première fois depuis
plusieurs années. Mais cette rencontre bouleversa pour toujours sa vie.
Gaenry, devenu proche des rois bosmer et altmer, ne semblait pas arrêter
son ascension. Il réclama alors de sa fille qu’elle devienne un
commandant des rôdeurs de Voileronce, de sa trempe, à son image, pour ne
pas ternir sa réputation. Ainsi, ses origines bosméries auraient pu
être oubliées. Cette rencontre effaça instantanément l’image que la
jeune bosmer avait jusque là, toutes les éloges que sa mère lui
chantaient, tout l’amour qu’elle lui portait, tout fut balayé en une
rencontre de quelques instants, fruit du hasard. Faejine ne put
pardonner à son père de tenir sa réputation en plus haute importance que
sa famille, pire que ses origines. Renier ainsi les siens et sa nature,
c’était renier le Pacte Vert. Malgrè toute son intelligence et son
éducation, Faejine perdit alors son amour pour son père et commença à
lui vouer une haine démesurée.

Cette
rencontre entre Gaenry et sa fille causa malheureusement encore plus de
désordre que le lien rompu entre eux. Faejine, ne cachant pas ses
sentiments envers son père, troubla sa mère qui devint très affectée pas
cette rupture. Finwee fut prise de chagrin, ne supportant pas ces
querelles et la haine que son premier et unique enfant portait à son
père. Finwee Odria mourut quelques mois après cette rencontre, dans de
sombres circonstances. Beaucoup parlaient de maladie, de fatigue ou
encore d’assassinat. Mais Faejine était convaincue que sa mère s’était
donnée la mort à cause du chagrin. Elle se sentit responsable de sa mort
et rejeta une haine encore plus grande sur Gaenry.

Dès
lors, elle refusa tout contact avec lui et décida de lui prouver son
erreur. Elle s’efforcerait de lui prouver qu’il était possible d’être
respecter en tant que Bosmer, impliquant toute sa culture et ses
coutumes. Elle se plongea avec encore plus d’acharnement dans ses
études, bien déterminée à tout maîtriser. Elle passait tout son temps à
étudier et à ruminer sa haine et sa tristesse. Faejine ne s’ouvrait
désormais plus à personne, son côté espiègle et jovial sembla
disparaître. Elle obtint, quelques mois plus tard, son brevet puis passa
le concours pour entrer dans l’école d’officier de Prime-tenure. La
Bosmer le réussit haut la main, obtenant une bourse d’étude confortable
et s’installa dans le pensionnat. Durant ses études, elle apprit tout ce
qu’elle put. Elle s’entraîna au maniement des armes de manière plus
intense, plus poussée qu’à l’école militaire, l’histoire et la stratégie
prirent une place plus importante également. Elle fut également formée à
mener des enquêtes, étudier les documents et décrypter les codes. Des
cours pour mener les hommes au combat précédèrent aux cours de
politique, d’étiquette et de politesse. Les journées des étudiants
étaient particulièrement difficiles physiquement et mentalement, pensées
pour décourager ceux n’ayant pas la trempes qu’être officiers d’armée
nécessitait.

Passant
son temps à étudier et à ruminer ses sombres pensées, la Bosmer ne
s’ouvrait plus à personne. Elle s’investit exclusivement dans ses
études, et tint bon. Faejine montra un très bon potentiel et ses
professeurs étaient contents d’elle. Son investissement et ses efforts
la firent progresser rapidement, ses camarades devinrent petit à petit
plus âgés qu’elle, certains furent jaloux de son talent. Mais Faejine
n’y accorda pas la moindre attention. Ne parlant à personne, ne
s’intéressant à rien d’autre que ses études, son attitude renfermée, son
regard toujours dur et déterminé semblaient attirer les foudres. Il y
avait bien eu quelques altercations entre la Bosmer et des aînés, mais
elle prenait sur elle, se recentrant sur son objectif. Ses altercations,
ses difficultés et les coutumes de son peuple lui forgèrent le
caractère et la patience. Les coutumes bosmers voulaient que ces
embêtements se règlent par des tours, des farces, mais Faejine ne
cherchait pas à s’engager dans cette spirale. Durant toutes ses études à
l’école d’officiers de Prime-tenure, Gaenry ne se manifesta pas, lui et
sa fille ne se croisèrent même pas une fois.

Attente

En
2E 578, l’éruption des âmes bouleversa le cours de l’histoire. Ce
phénomène étaient dû à une explosion d’énergie des arcanes, dont les
répliques magiques furent ressentis dans tout Tamriel, causant de
nombreux morts. D’immenses ancres noires se déployèrent dans le ciel de
Nirn, invoquées par Molag Bal qui profita du chaos provoqué par
l’éruption pour tenter d’envahir Nirn. Beaucoup sombrèrent dans la folie
en voyant les Daedra apparaître en grand nombre. Et les peuples de
Tamriel se réunirent pour faire face à cette nouvelle menace, ce fut le
début de la Coalescence. Faejine vécu cet évènement dramatique depuis le
pensionnat de l’école des officiers de Prime-tenure. A quatorze ans, la
Bosmer avait bien changée. Elle n’était plus la petite Elfe espiègle et
maligne que sa défunte mère chérissait, avec de petites bosses sur le
front révélant de futures cornes qui faisaient la fierté de son père.
Maintenant, elle ressemblait d’avantage à une jeune femme, tout en
courbes et au regard dure. Ses cornes avaient bien poussée, déjà longues
de quelques six ou sept centimètres, et venaient accentuer son attitude
déterminée et sévère. Elle portait désormais une armure de plaque,
signe que son diplôme approchait, tout de bleu et doré, les couleurs de
la famille royale Altmer. Le prince Naemon était, depuis la disparition
de sa sœur et héritière Ayreen, destiné à monter sur le trône au décès
de son père. Le roi se portait mal depuis plusieurs années mais son état
empira brusquement avec l’éruption des âmes. La dernière promotion
d’officiers fut diplômée avec quelques mois d’avance, pour leur
permettre de rejoindre la Coalescence. Faejine, bien que consciente de
la menace que représentait Molag Bal et ses armées, ne put se résoudre à
abandonner la haine qu’elle entretenait pour son père depuis cinq ans.
Elle profita de ces évènements pour se relancer vers sa vengeance.
L’éruption des âmes et le combat contre Molag Bal seraient le cadre
parfait pour prouver à son père, Gaenry, qu’il était possible d’obtenir
le respect, le rang et la notoriété qu’il désirait tant sans renier ses
origines bosmériques, les pratiques, les coutumes de son peuple, ni
rompre le Pacte Vert.

L’ambiance,
depuis que la Bosmer portait l’armure des prochains diplômés, avait
changé à l’école des officiers. Les élèves de sa promotion ne pouvaient
plus ignorer ses talents, mais ne montraient plus de jalousie, la menace
bien présente resserrait les liens entre les étudiants. De même que les
années et les exercices permirent aux élèves de se créer des relations.
L’attitude de Faejine ne dérangeait plus, tous s’y habituèrent.
Particulièrement un Altmer. Faejine se retrouva souvent en binôme avec
lui pour les devoirs et les exercices. Bien qu’elle ne s’ouvrait pas à
lui, l’Altmer essayait de passer du temps avec elle en dehors des
exercices. Mais, la Bosmer ne lui accordait pas plus d’attention qu’aux
autres, il finirait bien par se lasser et elle devait se concentrer sur
ses études, se disait-elle.

En
2E 579, les études d’officiers de Faejine touchèrent enfin à leur fin
après six ans passés dans le pensionnat. La cérémonie des diplômes
aurait lieux dans quelques jours. D’ici là, les élèves en armure avaient
quartiers libres. La jeune Bosmer, contre son habitude, fit un tour en
ville. Prime-tenure, la capitale des Haut-elfes d’Auridia, lui semblait
très différente de lorsqu’elle était enfant. Faejine se rendit compte
que durant ses six ans passés à étudier et à ruminer sa haine, de
nombreuses choses avaient changé. Malheureusement tout n’avait pas
changé pour le mieux. La guerre et la Coalescence mirent à mal beaucoup
de monde et de chose en à peine un an. Elle ne regretta pas d’avoir
évoluée à la pension sans se préoccuper de l’extérieur. Finalement, la
Bosmer décida de se rendre à la caserne, pour s’imprégner de l’ambiance
et des lieux qui seraient sûrement bientôt son quotidien. La caserne
était en pleine activité, les armées de Molag Bal et les tensions avec
les autres alliances étaient palpables d’ici. Faejine appréciait
l’ambiance. Tout le monde s’occupait et savait exactement ce qu’il
devait faire, tout avait une place. Pas de bavardage inintéressant, pas
de messes basses, pas de regard en biais bien que quelques regards
curieux. Ici, même ses cornes semblaient à leur place.

Faejine
visitait la caserne, lentement, prenant le temps de regarder et de
s’imprégner de l’ambiance, l’après midi commençait à peine. Elle croisa
quelques personnes qu’elle connaissait et elle en regarda s’entraîner.
Le temps passait lentement quand elle n’avait rien à étudier, alors elle
décida de rendre visite aux Rôdeurs de Voileronce. Arrivée à
l’extérieur de la caserne, elle s’arrêta, réalisant qu’elle pourrait
croiser Gaenry avec les rôdeurs. Soupirant, la Bosmer se dirigea
finalement vers la taverne, elle espérait y trouver une moyen de passer
le reste de la journée, et trouver une occupation pour les deux
prochains jours, jusqu’à la cérémonie des diplômes. La taverne se
situait près du port, l’air iodé et les embruns lui donnèrent le
tournis. Les forêts du Val-boisé lui parurent bien loin. Elle n’avait
que peu de souvenir de sa vie là-bas, mais sa mère ne tarissait pas de
lui décrire ce qu’elle ratait, en étant ici, en Auridia. Elle s’extirpa
de ses souvenirs, attirée par la discussion d’un groupe de militaires à
côté d’elle. Leur sujet de conversation tournait autour de cette ancre
noire, apparue récemment à proximité de l’entrée nord-ouest de la ville.
Ils racontaient avoir vu des gens s’y envoler puis des drémoras en
descendre. Faejine sut qu’il s’agissait des sacrifices nécessaires à
l’invocation des armées de Molag Bal sur Nirn par le biais de l’ancre,
mais la suite l’interpella beaucoup plus. Les militaires racontèrent
avoir également vu un être écailleux immense, à la tête d’alligator, aux
bras aussi épais que leurs cuisses, ses épaules aussi large qu’une
maison, qui hurlait et crachait du feu. La description, bien qu’un peu
exagérée, correspondait à celle de ses professeurs. Un daedroth était
apparu à proximité de Prime-tenure. Le climat actuel se révéla être
particulièrement propice à ses projets, les armées du prince daedra
serait une bonne épreuve, se dit la Bosmer en rejoignant sa chambre à
l’école des officiers.

Cérémonie

Le
jour de la cérémonie des diplômes arriva enfin. Le temps était adéquat,
pas de nuage, une légère brise marine et une ancre toujours active.
Faejine avait revêtu son armure bleu et doré et empoignait un long
bâton, commandé spécialement à un artisan impérial de passage, un
certain Kyuji. Ellle rejoignit la cours où allait se dérouler la
cérémonie. Sur le chemin, elle put voir tous les futurs officiers
équipés de leurs armures, l’air réjouit parfois, grave le plus souvent.
Les armes qu’ils portaient allaient de l’épée simple à l’arc en passant
pour tous les types d’armes possible. Beaucoup cependant préféraient les
bâtons, les Altmers avaient depuis toujours une affinité particulière
avec la magie. Dans la cours, devant les diplômés alignés, les
professeurs et les hauts gradés militaires et politiques se réunirent.
Le prince Naemon était également présent, en tant qu’héritier du trône.
La cérémonie était d’une efficace simplicité, les diplômés furent
appelés à venir chercher ce qui symbolisait leur diplôme. Chaque symbole
était personnel, pouvant aller d’une arme rituel à la simple pierre
précieuse en fonction des affinités de chacun. Lorsque Faejine fut
appelé, tous les professeurs l’applaudirent, les militaires et
politiques fixèrent leur regard sur elle, la jugeant, parfois pas
curiosité, parfois d’un œil critique ou appréciateur. Elle rejoignit le
prince qui se retourna et lui tendit son symbole. Sur un tissu délicat,
le prince lui présenta le symbole d’Yffre, gravé finement dans un os,
les branches et feuilles représentant le Pacte Vert. Faejine leva les
yeux vers le Prince et le remercia d’un signe de tête avant d’exécuter
la révérence d’usage de la cérémonie puis rejoignit sa place dans les
rangs des diplômés. Ce symbole, représentant à la fois la fin de ses
études, son lien avec le Pacte Vert et ses racines, était un présent de
grande valeur. Gravé dans l’os, il respectait les pratiques de son
peuple et revêtait une signification particulière pour la Bosmer. Une
première preuve qu’il était possible de gagner l’estime d’autrui dans le
respect de ses origines.

Lorsque
la cérémonie prit fin, tous les diplômés avaient reçu leur symbole.
Certains militaires ou politiques abordèrent alors les nouveaux
officiers pour les recruter. Faejine attira l’attention de plusieurs
militaires, avec qui elle discuta naturellement des combats menés en
Cyrodil, ceux contre les armées du prince daedra ou encore de stratégie.
La Bosmer fut invitée à rejoindre plusieurs unités pour y apporter son
soutient stratégique et au combat. Elle leur promit de prendre sa
décision rapidement et de leur faire savoir de son choix dans les plus
brefs délais. Elle les salua avant de prendre congés alors qu’il ne
restait déjà plus que quelques personnes dans la cours. En se
retournant, Faejine croisa le regard de cet Altmer avec qui elle avait
fait équipe de nombreuse fois auparavant. Elle lui fit un signe de la
tête et se dirigea vers la sortie. L’Altmer répondit à son signe de tête
mais ne la quitta pas des yeux. Une fois que la Bosmer eut passé la
porte, il soupira et sortit à son tour de la cours.

Faejine
passa la soirée à ranger ses affaires, c’était la dernière nuit qu’elle
passerait au pensionnat. Elle nota ensuite par écrit les différents
postes qui lui avaient été proposés. Elle cherchait un poste qui lui
permettrait de mené des combats contre les armées de Molag Bal, les
affrontements pour le trône de Cyrodil ne l’intéressaient que très peu.
Elle tira un trait sur deux noms de sa feuille, il lui restait à choisir
entre deux autres. Les deux postes proposaient à la fois du soutient
stratégique et du combat au front. Leurs champs d’actions étaient les
territoires d’Auridia et du Val-boisé, et leur mission était
principalement de repousser les armées du prince Daerdra. Les deux
postes se révélèrent assez similaires. Pour les départager, elle nota
les noms des personnes avec qui elle avait discuté dans l’après midi,
Siraën Lothelil et Inior Artdarion. Aucun des deux commandants n’avait
fait grande impression à la Bosmer, ils avaient tous deux montré autant
d’intérêt pour ses qualités de combattantes que magiques et
stratégiques. Elle ferma les yeux et les visualisa dans son esprit.
Aucun d’eux n’avait de signe particulier, aucun ne l’attirait plus que
l’autre. Elle n’arrivait pas à choisir. Soupirant, elle décida de
choisir au hasard. Elle compta le nombre de lettres dans leurs noms…
Autant pour l’un que pour l’autre, s’en devenait risible. Elle haussa
les épaules et choisit le premier à l’avoir abordée, rayant un nom sur
sa feuille. Son commandant serait Siraën Lothelil. Faejine écrivit des
lettres de remerciements et d’excuses pour les trois postes qu’elle
refusait et chargea un courtier de les livrer demain à la première
heure. Enfin la Bosmer se coucha alors que la nuit était déjà bien
avancée.

Le
lendemain, Faejine s’habilla avec des habits classiques, n’étant plus
étudiants mais pas tout à fait militaire, et se rendit à la caserne. Là,
elle dépêcha un commis pour récupérer ses affaires au pensionnat, puis
se dirigea vers le quartier de son futur commandant. La Bosmer ne se
sentait pas à sa place en tenue civile contrairement à de sa visite
quelques jours auparavant où elle s’y était senti très à l’aise.
Soupirant, elle demanda son chemin à un militaire qu’elle ne connaissait
pas. Celui-ci, curieux de trouver une civile Bosmer ici, la conduisit à
travers la caserne en lui faisant la discussion. Siraën Lothelil se
trouvait dans une cours, en train de superviser l’entraînement de son
unité. Faejine remercia son guide et prit quelques instants pour les
observer. Ils étaient bien coordonnés, parfaitement synchronisés et
disciplinés. La Bosmer devrait s’y plaire. Faejine se décida enfin à
aller se présenter à son futur commandant.

Templier

Le
commandant Lothelil accueillit chaleureusement Faejine et la présenta
au reste de l’unité avant de lui parler en aparté. Une fois éloigné des
autres membres de l’unité, il lui expliqua plus en détails leurs
missions, leur rôle et leur périmètre d’action. La Bosmer serait à la
fois combattante et en soutient stratégique sur le front. C’était
parfait pour elle qui ne se voyait que sur le terrain, au milieu des
combats. Une fois la présentation terminée, le commandant emmena Faejine
vers les quartiers privés des membres de l’unité pour lui faire visiter
les locaux. A côté du lit qui lui était destiné, elle trouva une
armoire et un mannequin sur le quel reposaient les éléments d’une armure
neuve. Tout en acier noble gris et or, en courbes et doublée de cuir,
l’armure était magnifique. Le commandant Lothelil lui expliqua qu’elle
devrait aller la faire ajuster sur l’instant pour prendre sa place dans
l’unité, une fois fait, elle rejoindrait l’unité au terrain
d’entraînement. La Bosmer s’exécuta, elle emballa sa future armure et se
rendit à l’armurerie où elle la fit ajustée.

C’était déjà le début de l’après-midi quand Faejine rejoignit enfin
le reste de l’unité pour commencer l’entraînement. Enfin, il s’agit plus
d’un test que d’’un entraînement. Faejine dut montrer ses talents à
tous les autres membres de l’unité, elle les combattit un à un ou en
deux contre un, puis en équipe pour s’immerger dans la synergie de
l’unité. La Bosmer appréciait ce genre d’exercice et s’y prêta bien
volontiers. Au contraire des étudiants de l’école, les militaires, déjà
bien entraînés, montraient une cohésion parfaite, les ordres se
limitaient au stricte minimum mais la réponse des combattants était
toujours immédiate et coordonnée. Durant ces exercice Faejine dévoila
ses capacités magiques, jouant à invoquer lances dorées, murs d‘éclairs,
boules de feu et, à la surprise générale, incantations de soin. Toute
l’unité, surprise, se retourna vers elle lorsqu’elle finit son
incantation. Il semblait que personne n’était au courant de ses pouvoirs
là. Le commande Lothelil, sourit en coin aux regards surpris que lui
lançaient certains membres de l’unité et s’avança pour parler à tout le
monde. Il expliqua avoir recruté la Bosmer non seulement pour ses
capacités au combat ou son sens stratégique, mais aussi pour ses talents
de rétablissement. Il se moqua gentiment de ses soldats en expliquant
que l’invocation de la lance dorée auraient dû leur mettre la puce à
l’oreille et que Faejine était un templier. Les membres de l’unité
rirent et crièrent, ils avaient justement besoin d’un templier à leur
côté pour les futures missions, les armées de Molag Bal étant plus
dangereuses que ce à quoi ils s’attendaient. Le commandant reçut alors
un ban général. Faejine fut surprise de ce changement d’ambiance
radicale mais prit part aux réjouissances spontanées mais de courte
durée. Le commandant les remit en ordre d’un geste et les exercices
reprirent. Lothelil orienta ensuite les ordres de façon à exploiter les
incantations de rétablissement de Faejine et la dynamique du groupe
évoluait différemment maintenant.

Les jours suivants, l’unité de Lothelil revit sa cohésion et sa
synergie pour prendre en compte les nouveaux atouts de l’équipe. Le
commandant et Faejine discutaient régulièrement des déplacements et des
positionnements dans l’unité pour exploiter les sorts de rétablissement
tout en comblant les faiblesses que cela impliquait. Faejine se sentit
rapidement impliquée et intégrée dans l’unité. Ce n’était pas la seule
femme ni la seule Bosmer et les militaires ne s’encombraient ni de
préjugés ni de jalousie. Leurs objectifs communs, leur commandement
commun et leurs combats côte à côte permettaient d’oublier rapidement
toutes les différences. Quelques semaines après l’arrivée de la Bosmer,
les mouvements et actions de l’unité étaient parfaitement coordonnées et
exécutés à la perfection. Alors, quand le commandant Lothelil annonça
qu’ils étaient envoyés en mission à Prasin, toute l’unité de se réjouit
de tester leurs nouvelles manœuvres. Dès le lendemain, l’unité se mit en
route pour les terres de Prasin, dans le Val-boisé. Sur le trajet, le
commandant Lothelil leur détailla la mission. Elle consistait à
parcourir la région d’est en ouest et de libérer la région de la
présence de l’armée de Molag Bal. Entre les ancres noires de la région
et leur réseau d’approvisionnement des drémoras, l’unité aurait fort à
faire, ce qui n’était pas pour leur déplaire. Bien au contraire, voila
trop longtemps que l’unité était en attente, cloîtrée dans la caserne à
ne faire que des exercices. Il était temps de passer à l’action.

Toute l’unité du commandant Lothelil était donc en effervescence dans
la cours au moment du départ. Les paquetages étaient faits, les
chariots attelés, les armes et armures lustrées, les hommes et femmes
silencieux, impatients. Le trajet serait long et monotone à travers les
forêts du Val-boisé jusqu’à Prasin. Le commandant arriva enfin pour
donner l’ordre de départ. Tout se mit en route d’un même mouvement,
l’unité de Lothelil mettait toujours un point d’honneur à montrer toute
leur discipline. Faejine, à cheval sur une grande jument noire,
chevauchait aux côtés du commandant et des deux autres officiers. Sur le
trajet, la Bosmer était en charge de l’approvisionnement, elle
surveillait donc du coin de l’œil que les chariots suivaient bien,
prenait notes des rations distribuées et se chargeait du ravitaillement
en eau et vivres. Elle aimait ce genre de travail, cela lui permettait
d’être en contact avec les gens des villages traversés. L’aspect
salutaire de son poste s’accordait également parfaitement avec son rôle
au combat.

Prasin

Prasin
était une région du Val-boisé, très dense, peuplée d’orques et d’elfes
des bois principalement. Le ciel derrière les grands arbres était
souvent bleu, et l’air chavirait les odeurs forestières mêlées aux
odeurs iodées de la mer lointaine. Le retour dans le Val-boisé, région
natale de Faejine, ne la laissait pas indifférente. Elle retrouva des
odeurs, des bruits, l’ambiance du Vert, depuis trop longtemps oubliés.
La Bosmer se replongea dans les coutumes de son peuple avec plus
d’ardeurs, poussant l’unité à respecter une partie de ses pratiques.
L’équipe s’y prêta volontiers, du moins tant que ça ne ralentissait pas
leur rythme de marche, ce que Faejine apprécia grandement. Les liens
entre les membres de l’unité en devinrent encore plus fort. Le sentiment
d’appartenance au groupe était fort pour tous et l’équipe était
parfaitement soudée lorsqu’elle arriva à Prasin.

Dans
le ciel dégagé de Prasin, il était facile de repérer les grandes ancres
noires du prince Daedra, ces grands cercles de métal noir dans le ciel,
failles donnant sur Oblivion, desquelles sortaient d’immenses chaînes
du même métal noir. Le prince Daedra espérait attirer Nirn en Oblivion
en tirant sur ces chaînes, mais les ancres lui permettaient également de
faire traverser les plans à ces armées pour envahir Nirn. Détruire ces
ancres était la première mission de l’unité de Lothelil pour ralentir
les plans de Molag Bal. Après quelques jours passés sur les terres de
Prasin, les éclaireurs avaient trouvé l’emplacement idéal pour établir
le campement de l’unité qui devait stationner ici plusieurs mois.
L’unité s’y rendit et monta le camp, entre trois lieux de rituels
d’invocation d’ancres. L’emplacement était adéquate, la forêt cachait
les abords du campement et leur fournissait eau et nourriture. Les
membres de l’unité déchargeaient donc les chariots, préparaient les
tentes et montaient les enclos pour leurs chevaux lorsque le ciel à
l’ouest se déchira brusquement. Tous levèrent la tête et, entre les
arbres, découvrirent une ancre noire. Soudain, l’ambiance au sein de
l’unité changea, tous savaient exactement ce qu’ils avaient à faire.
Certains terminèrent de monter les enclos alors que d’autres
s’équipèrent de leur armure et armes. Les éclaireurs étaient déjà partis
et les officiers se regroupèrent rapidement. Le temps pressait mais la
nécessité était à l’organisation et à la préparation. Les décisions
furent prises rapidement afin que tout soit prêt au retour des
éclaireurs. L’ancre n’était pas loin, à peine à quelques minutes à
cheval. Le commandant divisa son unité lorsque les éclaireurs revinrent
faire leur rapport. Les combattants équipés, dont Faejine faisait
partie, sautèrent sur leur cheval et se mirent en route, disciplinés, en
direction de l’ancre.

Le
commandant Lothelil et les officiers en première ligne aperçurent
rapidement le lieu du rituel noir. Les adeptes étaient encore seuls, pas
de dreamora ni daedra en vue. Le commandant donna l’ordre de mettre
pied à terre d’un signe de la main, à bonne distance du rituel. Les
combattants attachèrent ensuite rapidement leurs chevaux et se
positionnèrent pour le combat à venir. Faejine ajusta sa prise sur son
bâton, un nouveau bâton de rétablissement, à peine testé sur le trajet.
L’air grave, toute l’unité attendait l’ordre d’engager les hostilités.
Lorsque le commandant lança la charge, suivi d’un même mouvement par
toute son unité, le premier adepte de Molag Bal quittait le sol pour
s’offrir en sacrifice à l’ancre. Les adeptes furent rapidement mis hors
d’état de nuire, mais les premiers esclaves de Molag Bal se
matérialisaient déjà. L’unité enchaîna ses mouvements avec précision,
repoussant Faucheclan, Pestemort, zombis et dreamoras. Un à un, les
verrous de l’ancre exposèrent leur cœur fragilisé par les énergies
daedriques du combats. Le commandant chargea un officier de les
détruire. Alors que le combat semblait ralentir au pied des grandes
chaînes, un daedroth colossal apparu soudainement. Il était différent de
tous ceux dont Faejine avait déjà entendu parler. Celui-ci avait un
corps écailleux ressemblant à celui d’un serpent ou d’un lézard, dotés
de deux paires de bras aux longues mains crochues et pourvues de
griffes. Sa tête, aux traits plus ou moins humains, était sertie de
cornes écailleuses et ses yeux reflétaient une intelligence malsaine. A
peine quelques secondes s’écoulèrent que déjà la créature psalmodiait.
Un nuage d’éclair s’abattit sur l’unité, Faejine réagit aussitôt et
invoqua des cercles de soins et ses sorts de rétablissement selon les
manœuvres prévues en entraînement. Les membres de l’équipe, ainsi
revigorés, retrouvèrent leurs esprits et se lancèrent dans le combat. La
créature se montra puissante et d’autres esclaves continuaient
d’arriver.

Le
combat faisait rage, mais l’unité de Lothelil était bien entraînée,
seule la créature écailleuse résistait à leurs assauts. Alors que le
combat s’éternisait, de nouveaux combattants rejoignirent l’équipe de
Faejine, attirés par l’ancre visible de loin dans le ciel. Cette aide
bienvenue enhardit de plus belle l’équipe. Sous les ordres des Lothelil
et des officiers, tous les combattants joignirent leurs forces pour
vaincre la créature écailleuse, qui finit par céder sous leurs assauts
incessants. Le dernier verrou de l’ancre s’affaiblit avec la mort de la
créature, Lothelil le détruisit, refermant ainsi la faille dans le ciel.
Les chaînes et l’ancre noire disparurent dans un grand fracas,
soufflant un vent fort avant de laisser place au silence. Le ciel
redevint bleu et clair. L’unité retrouva sa discipline et se rangea
derrière leurs officiers qui engagèrent la discussion avec les nouveaux
venus, les remerciant de leur aide et s’interrogeant sur leur identité.
Ils se présentaient comme un groupe de mercenaires, mandaté par le
village avoisinant pour les défendre contre les créatures venant des
ancres. Faejine aperçut cependant un insigne particulier sur l’armure de
l’un d’entre eux alors que les autres ne montraient aucun signe d’une
appartenance quelconque. Faejine détailla plus précisément le symbole,
un cercle de feu jaune sur fond noir, semblable à un soleil en pleine
obscurité. Il lui était inconnu mais le grava dans sa mémoire pour
enquêter dessus lorsque la situation serait plus calme.

Opposition

En
l’an 2E 580, dans le camp de l’unité de Lothelil, tous vaquaient à
leurs occupations. Cela faisait maintenant plusieurs mois que le
campement était établie. Depuis leur arrivée, deux ancres avaient été
fermées et un rituel abrogé. Les éclaireurs enquêtaient sur le réseau
des adeptes. La routine s’était installée naturellement. Ici, comme à la
caserne, tout avait sa place. Ce matin là, un messager de Prime-tenure
arriva avec des nouvelles d’Auridia et s’entretint avec le commandant et
ses officiers. Le roi Altmer était décédé quelques semaines auparavant.
Durant le couronnement du prince Naemon, la princesse Ayreen, première
héritière du défunt roi, réapparut en revendiquant son accession au
trône. Les hautes instances couronnèrent donc Ayreen plutôt que son
frère. La reine Ayreen, comme première action de son règne, fit ratifier
les traités pour la constitution du Domaine d’Aldmérie et se lança dans
la guerre des Alliances. Le commandant questionna le messager sur les
desseins de la reine. Celui-ci lui expliqua que la reine semblait
s’intéresser particulièrement au trône de Cyrodil. De faite, la reine
rapatriait toute son armée à Faneracine, devenue la capitale du Domaine.
A ce mandement, le commandant tapa du poing sur la table, faisant
sursauter toutes les personnes présentes. Lothelil ne s’était encore
jamais emporté en dehors de la présence exclusive de ses officiers. Il
congédia le messager d’un geste exaspéré avant de se laisser tomber sur
une chaise. Le commandant se passa une main sur le visage et ouvra le
débat sur la raison d’un tel ordre. Abandonner le combat contre le
prince Daedra au profit de la guerre des Alliances n’était en rien la
vocation de l’unité, tous les officiers étaient unanimes. Bien d’accord
avec ces officiers, le commandant Lothelil dépêcha alors son officier le
plus diplomate, Aren Hirindiel, et quelques uns de ses meilleurs
combattants pour se rendre à Faneracine défendre leur mission. Le reste
de l’unité resterait stationnée à Prasin et continuerait le combat
durant leur absence.

En
sortant de la tente du commandement, Lothelil expliqua à son unité la
tournure des évènements. Les combattants manifestèrent leur
mécontentement face à de tels ordres, dans le calme et la discipline. Le
commandant répondit à leur protestation en leur expliquant ce qui avait
été décidé, l’officier Hirindiel et quelques membres partiraient à
Faneracine pour défendre l’urgence et la nécessité de leur mission
pendant que le reste de l’unité continuerait le combat ici.
L’approbation de l’unité se fit de vives voix et les discussions sur les
objectifs de la reine Ayreen allèrent bon train. Laissant leur
frustration s’épancher, les officiers se réunirent à nouveau pour
établir leurs stratégies et pallier au départ de l’officier Hirindiel et
de son escorte. Après cette mise au point avec le commandant, Faejine
rejoignit sa tente, très en colère contre la reine. Sa disparition était
déjà étrange à l’époque, mais sa réapparition l’était encore plus.
Pourquoi était-elle partie? Où était-elle pendant ces treize ou quatorze
dernières années? Que faisait-elle? Pour le compte de qui? Pourquoi
ressurgir maintenant, à la mort du roi? Simplement pour monter sur le
trône? Quels étaient les objectifs que cachait sa disparition? Tant de
questions, Faejine espérait seulement que la concentration de la reine
sur la guerre des Alliances n’avait rien à voir avec les investigations
du prince Daedra. Les desseins de la reine Ayreen ne l’intéressaient pas
outre mesure, tant qu’elle pouvait se battre contre les engeances
d’Oblivion. Elle décida de laisser ces problèmes de côté. Tout comme le
reste de l’unité, Faejine comptait sur les négociations avec la reine
pour leur permettre de continuer le combat à Prasin.

Cela
faisait une dizaine de jours que le messager était reparti, accompagné
de l’officier Hirindiel, chargé de défendre la cause de l’unité.
Lothelil pensait recevoir une réponse dans les prochains jours, mais il
avait encore fort à faire avec les ancres noires de la région. Tout le
monde était très occupé depuis le départ du diplomate, si bien qu’en fin
de journée, le retour de celui-ci et de son escorte passa presque
inaperçue. Les officiers se réunirent dans la tente de commandement pour
le rapport quotidien quand les pans de la tente se soulevèrent pour
laisser passer Hirindiel. Tous se retournèrent vers lui en silence, le
questionnant du regard. Il leur expliqua que la reine Ayreen s’était
montrée très ferme, elle avait ordonné le retour de toutes les unités
pour les affecter sur le front en Cyrodil. Elle semblait avoir
conscience de la menace daedrique mais préférait laisser les guildes
s’occuper de ce problème, la guerre des Alliances était sa priorité. Les
officiers et le commandant soupirèrent en hochant la tête, certains
semblèrent résignés à obéir, mais d’autres refusèrent catégoriquement,
prétextant que la cause était plus importante que l’ordre. S’ensuivit un
véritable débat, obéir et se rendre en Cyrodil, ou se rebeller et
quitter l’armée pour combattre le prince Daedra. Deux clans se formèrent
petit à petit, ne trouvant pas d’accord. Les officiers, dans un ultime
espoir de trouver un compromis, se tournèrent vers leur commandant, lui
laissant le dernier mot. Bien conscient de la position et des arguments
de chacun, il décida de laisser le choix à chacun de suivre leurs
vocations. L’officier Hirindiel ayant anticipé ce choix avait réussi à
négocier la démission des membres de son unité sans implication néfaste,
ceux le souhaitant pouvaient donc quitter l’armée d’une simple lettre.
Le commandant demanda alors à ces hommes souhaitant partir de rédiger
leur lettre de démission de l’armée pour ne pas partir en déserteurs.
Ceux souhaitant rester dans l’armée les apporteraient à la reine, ainsi
que les biens de l’armée. Cette solution sembla satisfaire tout le
monde, mais signa la fin de l’unité de Lothelil. Ce soir là, le
commandant réunit toute son unité pour leur exposer la situation et la
solution choisie. Tous prirent leur décision rapidement, ils avaient eu
plus d’une semaine de doute où ce choix leur était déjà apparu. Chacun
retourna à sa tente, pour rédiger sa lettre de démission pour beaucoup
et ranger ses affaires pour tous. Faejine, bien sûre, écrivit sa lettre
de démission avec détermination, y expliquant ses raisons avec
véhémence.

Réorganisation

Cet
évènement marqua la fin de l’unité de Lothelil telle qu’elle avait
toujours existé jusqu’ici. Les chariots de l’armée étaient attelés, il
ne restait du camp que les traces laissées par les tentes, les enclos ou
les feux. Les membres restés dans l’armée et ceux l’ayant quittée se
séparèrent sans aucune animosité, au contraire. Ils avaient tous tissé
des liens étroits. De part le respect qu’ils éprouvaient les uns envers
les autres, ils acceptaient leurs choix, quel qu’il soit. Ils se
connaissaient tous, savaient qu’ils se reverraient, ils n’avaient pas
besoin de mots. Dans un dernier tressaillement de discipline, tous se
tournèrent vers leur commandant et lui présentèrent un salut militaire
dans une parfaite coordination, d’un seul mouvement. Le commandant, dans
ce moment solennel, s’avança vers le seul officier restant dans
l’armée, il luit tendit sa propre lettre de démission ainsi que son
insigne et le salua. Il se recula vers le gros de son unité, ceux
voulant continuer le combat à Prasin. Parmi les membres sur le départ,
il y avait aussi certains membres qui profitaient de la situation pour
rejoindre la guilde des guerriers, des mages ou d’autres de moindre
importance. Lors du départ, les anciens militaires adressèrent une
dernière révérence à leurs amis. Ils étaient maintenant plus de la
moitié de l’unité et ne disposaient plus du matériel de l’armée. Leurs
combats contre les esclaves de Molag Bal s’annonçaient difficiles. Pour
se réorganiser, Lothelil et ses hommes se rendirent dans la plus grande
ville de la région, Foyeraie. Là, ils trouvèrent de quoi monter un camp
de fortune où loger à l’extérieur de la ville. La taverne devint leur
quartier général et le marché leur principale source d’information et de
matériel.

Ce
soir-là, ce qu’il restait de l’unité de Lothelil se réunit à la taverne
pour discuter de leur avenir. Avec leur effectif actuel toutes les
stratégies de combats étaient à revoir et ils ne pouvaient plus se
permettre de combattre sur plusieurs fronts. Lothelil souhaitait
également trouver une nouvelle appellation, l’unité de Lothelil ne lui
convenait plus, ne faisant plus partie de l’armée. Il doutait d’obtenir
le droit de créer une guilde au sein du Domaine à cause de leurs
relations plutôt tendues avec la Reine. Se vendre en tant que
mercenaires ne l’intéressait pas, leur vocation étant le combat contre
Molag Bal. Tous étaient d’accord avec Lothelil mais aucun n’avait d’idée
à proposer. Pour l’instant, ils devaient se débrouiller en vendant
leurs services pour gagner de quoi s’organiser plus confortablement.
L’eau et les vivres n’étaient pas un souci et ils n’avaient pas besoin
de grand chose pour camper. Mais les armes et armures coûtaient chère,
tout comme les réparations. Ils se donnèrent un mois pour s’équiper et
repartir en guerre. Certains avaient des talents d’artisans, d’autres de
cuisiniers, tous pouvaient rejoindre une milice locale ou un corps de
chasse. Faejine avait beaucoup économisé durant ses études grâce à sa
bourse, elle n’avait pas besoin de faire tout cela pour s’acheter son
matériel, mais elle devait trouver à s’occuper. Pour l’instant, Faejine
contacta un armurier pour lui commander une armure, le forgeron de
Foyeraie était particulièrement doué et lui proposa une bien meilleure
armure que toutes celles que l’armée aurait pu lui fournir. Les
menuisiers ne la satisfirent cependant pas, alors elle recontacta celui
qu’elle avait rencontré à Prime-tenure, Lowell. L’impérial se trouvait
actuellement sur les terres de l’alliance de Daguefilante, mais étant
apatride et fervent partisan du combat contre le prince Daedra, il
accepta d’honorer sa commande, deux bâtons, un de rétablissement et un
de foudre. Ils se donnèrent rendez-vous à Prime-tenure dans dix jours,
les trajets individuels par l’oratoire étant presque instantanés partout
sur Nirn.

Pour
les prochains jours, Faejine décida de se rendre à Auridia, elle
trouverait bien de quoi s’occuper pendant un mois. La Bosmer se rendit à
l’oratoire de téléportation de Foyeraie et l’utilisa pour se rendre à
Prime-tenure. Le changement de climat et d’atmosphère, les flux magiques
qui traversaient le corps et l’esprit, laissaient toujours un sentiment
étrange et un moment d’étourdissement qui se dissipaient généralement
en quelques secondes. Il arrivait que les plus sensibles restent
hébétées plusieurs minutes, mais Faejine était habituée à voyagée ainsi.
Elle retrouva rapidement ses sens et se dirigea vers les locaux des
Rôdeurs de Voileronce. Elle ne trouva qu’un campement vide, un passant
qu’elle interrogea lui expliqua qu’ils étaient tous partis, il y avait
plusieurs jours, en missions pour la Reine Ayreen. Soupirant, elle
s’orienta vers la sortie, bien décidée à trouver de l’occupation auprès
des chasseurs ou des autres villages à proximité. Devant les portes
d’Auridia, la Bosmer se retrouva face à un guerrier tout en armure
portant un symbole qui attira son attention. Un soleil de feu sur fond
noir. Il lui fallut quelques secondes pour se rappeler où elle l’avait
déjà vu. Il s’agissait du même insigne que celui qu’elle avait remarqué
sur le mercenaire qui avait participé à la première fermeture d’ancre à
Prasin. Intriguée, et n’ayant rien à perdre, Faejine décida d’aborder le
guerrier et de l’interroger sur ce symbole. L’homme se nommait Lucifer
Corvinus et était membre d’une organisation qui combattait les diverses
menaces de Nirn. Le soleil brûlant sur fond noir était le symbole de
cette organisation, qu’il appelait l’Ordre. Sa curiosité rassasiée, son
intérêt prit l’ascendant. Faejine lui parla de son unité, de ses
convictions et de ses craintes. Lothelil et ceux qui étaient resté
avaient beaucoup en commun avec Corvinus. La Bosmer réussit à convaincre
le guerrier de rester en contact pour échanger des informations en cas
de besoin.