La Grande Compagnie de l’Ordre des Deux Vipères. Ce n’était pas la première fois que Kyuuji en entendait parler mais c’était la première fois qu’il visitait leurs locaux. La première dont il avait souvenir, du moins. Venceslas ne l’y avait conduit, prétextant des obligations et ne lui avait pas tellement laissé le choix. Selon son propre conseil.
Impressionnant était le seul mot qui lui venait à l’esprit depuis qu’il y était entré. Il ne faisait pas seulement référence au bâtiment immense qui leur servait de quartier général. L’organisation interne de la grande compagnie dépassait également tout ce qu’il pouvait imaginer.
Devant un tableau récapitulatif de cette hiérarchie, Kyuuji essayait de tout comprendre pour en retenir le maximum. La grande compagnie était dirigée par l’oracle Kan-E-Senna, une Padjal, également membre du Grand conseil des esprits. L’organisation pouvait être divisée en trois groupes, la direction, les unités d’élite et les troupes. La direction siégeait dans le quartier général pour élaborer et coordonner les opérations. Les unités d’élite, les archers et les maîtres d’hast, protégeaient la forêt. Enfin les troupes constituaient le gros de la compagnie, composées d’aventuriers, de jeunes soldats volontaires ou des membres des guildes locales, représentaient leur force militaire et leur soutient logistique.
C’était beaucoup d’informations pour un amnésique. Devant l’air ahuri du Raen, un membre de l’organisme se senti obliger de répondre à ses interrogations.
— Les membres sont regroupés en bataillons selon leur origine et leur fonction, expliquait-il patiemment. Les soldats en formation ensemble, les disciples de la terre et de la main ensemble, etc. Les aventuriers étant un cas à part, ils forment tous un bataillon particulier où tous se côtoient selon les besoins.
Kyuuji hochait la tête. C’était d’une logique imparable et cela devait être d’une au moins aussi bonne efficacité.
— La hiérarchie est commune à tous les bataillons. Elle est basée sur un système militaire, de simple soldat à officier supérieur. Les promotions s’obtiennent au mérite sans distinction de bataillon, d’origine ou d’autres choses.
Cela commençait à ressembler à un discours de recrutement, mais le Raen n’en dit rien. Avide de connaissance, il s’apprêtait à poser d’autres questions quand Venceslas l’interpella en lui faisant signe de le rejoindre dans un bureau adjacent. Kyuuji s’excusa auprès de l’homme qui s’était donné la peine de le renseigner et se dirigea vers le bureau.
La pièce était petite, très simplement meublé et à la décoration se limitait à quelques vases suspendus, rappelant ce lien avec la nature si particulier à Gridania. Deux Elézéns faisaient face à un bureau derrière lequel un homme, un Hyurois à priori, était assis. Tous les trois portaient la livrée de l’Ordre des Deux Vipères, mais Kyuuji n’aurait pu dire à quel bataillon ils appartenaient ni quels étaient leurs rangs, et discutaient vivement, sans porter attention aux deux amis.
Venceslas s’approcha du Raen et se pencha vers lui pour parler à voix basse sans déranger les autres.
— Ils ont presque terminé, ce sera bientôt à notre tour.
Kyuuji opina et écouta leur conversation pour patienter. Un des Elézens s’exprimait calmement mais il n’arrivait pas à cacher sa colère.
— Nous n’avions pas le choix. Les ordres étaient de récupérer ou détruire le matériel volé, rien d’autre. Jamais nous n’aurions pu rentrer en nous encombrant des blessés.
— Tu les as abandonnés à une mort certaine ! C’étaient tes hommes !
Le second Elézen était également hors de lui. Mais quelque chose semblait exagéré, comme s’il surjouait sa colère. La scène était étrange et attira toute l’attention de Kyuuji. Le premier Elézen reprit la parole d’un ton qu’il voulait neutre, mais il s’emportait légèrement.
— Aurais-je dû désobéir et faire échouer la mission ? Laisser aux mains des homme-bêtes tout notre matériel ? Je ne suis pas de cet avis !
Cette remarque faillit faire bondir Kyuuji qui se retint difficilement. Comment un officier pouvait préférer sauver du matériel à la vie de ses hommes, c’était incompréhensible. La scène, ici, au cœur du quartier général de l’Ordre des Deux Vipères, avait quelque chose d’irréel. Mais le Raen ne savait quoi.
— Oui, cria l’Elézen en rogne. Si c’était nécessaire tu aurais dû protéger tes hommes plutôt que le matériel !
Le Hyur, qui était resté silencieux jusque-là, se leva lentement en s’appuyant sur son bureau. Sa taille, son grade, sa prestance ou son autorité naturelle suffit à faire taire les deux hommes. Il les fixa un d’un regard dur puis se tourna vers le premier.
— Jeannoix, tu as fait le bon choix. Le matériel est plus important que la vie des…
Les mots suivants se perdirent dans le néant.